Notre cerveau joue aux devinettes

 

Nos cerveaux sont des machines incroyablement complexes, mais leur fonctionnement se résume parfois à un processus simple : ajuster nos croyances en fonction de ce que nous découvrons de nouveau. Cela semble un peu mystique, presque ésotérique, mais c’est en réalité une application de la logique pure, illustrée par une formule mathématique, le théorème de Bayes.

 

Imaginer un lion dans votre jardin ?

 

Le théorème de Bayes repose sur une idée simple : prendre ce que nous savons déjà (ou pensons savoir) et le combiner avec de nouvelles informations pour ajuster nos croyances. Imaginez : vous êtes dans votre maison tranquille, et soudain, vous entendez un rugissement. Votre première pensée n’est probablement pas « Oh, un lion dans mon jardin ! », parce que, soyons honnêtes, à moins que vous ne viviez près d’un zoo, cette hypothèse est plutôt improbable. Mais, ce bruit doit bien avoir une explication, non ? Peut-être un documentaire animalier qu’un voisin a eu l’excellente idée de diffuser à fond, une machine qui émet des bruits bizarres, ou des enfants qui s’amusent avec des sons d’animaux. Vous ajustez donc vos croyances, et la probabilité qu’un lion soit là augmente un tout petit peu, mais sans vous alarmer pour autant.

Ce que votre cerveau vient de faire, c’est ce que l’on appelle le traitement descendant. Il travaille à partir des modèles que vous avez déjà en tête, des attentes sur la réalité, pour interpréter ce que vous entendez.

 

Ce que nous voyons n’est pas toujours ce que nous percevons

 

 

Les exemples de ce fonctionnement sont partout autour de nous. Avez-vous déjà vu une phrase comme « LE CHAT DANS LE LE JARDIN » sans remarquer qu’il y a deux « le » ? Votre cerveau, qui connaît déjà la phrase « LE CHAT DANS LE JARDIN », ignore automatiquement la répétition. Ou encore, lorsqu’on vous montre une image un peu floue d’un animal, il se peut qu’elle ne vous dise rien, jusqu’au moment où quelqu’un vous souffle à l’oreille : « C’est une vache ». Dès lors, votre cerveau ne peut plus la voir autrement. C’est ça, le traitement descendant : vos attentes influencent ce que vous voyez.

Cela devineat amusant qaund on raleise que notre ceverau est cpabale de rconsretruire des prahses même si les ltteers itnernes des mtos sont inorcrectes ou mleanigées. Nous ne liisons pas lteere à ltteere, nous rconanosssons des shcéams glbaux.

 

Quand tout s’embrouille : délires et hallucinations

 

Malheureusement, ce système a ses failles. Parfois, tout s’embrouille. Chez les personnes souffrant de schizophrénie, par exemple, ce processus peut se dérégler. Imaginez que votre cerveau commence à accorder trop d’importance à des stimuli qui, d’ordinaire, seraient ignorés. Vous lisez un article de journal sur l’économie, et soudain, cela vous semble profondément significatif, comme si cet article était écrit spécialement pour vous.

C’est ce qui arrive lors de délires de référence. Le cerveau n’arrive plus à faire la distinction entre ce qui est important et ce qui ne l’est pas, tout devient saillant. Cette perturbation peut aussi être déclenchée par des drogues comme la kétamine, qui dérègle la « poignée de main » – une main qui monte avec nos perceptions, une main qui descend avec nos croyances préalables, et qui se serrent à mi-chemin – entre ce que nos sens captent et ce que notre cerveau s’attend à recevoir.

 

Hallucinations et drogues psychédéliques

 

D’autres drogues, comme le LSD, font encore plus fort. Elles ne se contentent pas de dérégler notre perception ; elles amplifient à la fois le bruit sensoriel et les croyances préalables. Résultat ? Le cerveau essaie de donner du sens à ce chaos, et vous voyez des choses qui n’existent pas. Votre cerveau tisse une histoire à partir du rien. Ceux qui ont pris du LSD parlent souvent de sentiments mystiques, d’une impression que tout dans le monde est relié, que tout fait partie d’un « grand plan ». Et d’une certaine manière, leur cerveau essaie vraiment de faire en sorte que tout se connecte.

 

Autisme et hypersensibilité sensorielle

 

Chez les personnes autistes, un phénomène similaire se produit, mais d’une manière bien différente. Leur cerveau semble avoir des « intervalles de confiance » très étroits. C’est comme si, pour eux, chaque petite variation dans les sensations devenait importante. Un simple t-shirt frottant légèrement la peau pourrait devenir si gênant qu’il leur est impossible de l’ignorer, là où la plupart des gens n’y prêteraient même pas attention. Cela explique aussi pourquoi beaucoup d’entre eux aiment les routines strictes ou les mouvements répétitifs, comme balancer les bras. Ces actions prévisibles leur permettent de créer un environnement sensoriel qu’ils contrôlent entièrement, en réduisant l’imprévu et en atténuant l’inconfort.

 

Ce que cela révèle sur notre cerveau

 

Toutes ces observations nous apprennent quelque chose d’important : notre perception de la réalité est une danse subtile entre ce que nos sens nous disent et ce que notre cerveau attend. Quand cette danse fonctionne bien, nous naviguons dans le monde avec aisance. Mais quand elle est perturbée, que ce soit par une maladie, une substance ou une altération du traitement sensoriel, tout peut soudainement devenir étrange, surprenant ou même terrifiant.

Le cerveau humain est une merveille, mais aussi un mystère. À chaque instant, il tente de concilier ce que nous savons avec ce que nous vivons, parfois avec des résultats inattendus.

 

 

 

Arpenteuse au long cours. Cartographe du Crible. Gratteuse de palimpsestes. Tous ignorent cet obscur nom, des énigmes révéleront où gît l’ancienne. Actias Luna ~, attirée par la flamme. A bas les freloches.